Plaidoyer pour l'élimination : Vers une Asie du Sud-Est libre de rage

Les maladies tropicales négligées (MTN) constituent un groupe varié de maladies essentiellement prévalentes en zone tropicale. Elles mettent une terrible pression sanitaire, sociale et économique sur les membres des communautés défavorisées et entraînent des conséquences sanitaires, sociales et économiques dévastatrices. Ce terme est utilisé par l’Organisation Mondiale de la Santé qui a priorisé 20 de ces maladies pour les combattre en accord avec les Objectifs de Développement Durable (SDGs) des Nations Unies. Huit des ces 20 maladies sont des maladies zoonotiques négligées et la rage est l’une d’elles. Mais qu’est-ce que cela signifie au juste ? Comment une maladie que des organisations internationales, des gouvernements, la société civile et le secteur privé travaillent à éliminer peut-elle être considérée négligée ?

BI STOP Rabies-GARC Philippines IEC campaign

La rage est considérée négligée car, à la fois au niveau mondial et au niveau national, les parties prenantes et les décideurs n’ont pas conscience de son importance et ne l’ont pas priorisée. Les agences de financement mondial, comme la Banque Mondiale, ne soutiennent généralement pas les efforts d’élimination de la rage, malgré une demande globale d’amélioration de la santé et du bien-être dans le cadre des SDGs et une demande d’amélioration de la couverture santé universelle et de renforcement du système de santé pour la communauté globale. La rage reste donc sous-financée, en particulier dans les zones les plus touchées par la maladie. Résultat : le problème de la rage presiste.

C’est pourquoi des campagnes de sensibilisation globale comme “Finissons-en maintenant avec la rage“, la Journée Mondiale contre la Rage du 28 septembre et d’autres mobilisations sont si importants. Le but est de sortir la rage véhiculée par le chien de la liste des maladies zoonotiques négligées pour la placer dans la liste des maladies qui ont été éliminées. Pour cela, nous devons agir, accroître la sensibilisation, défendre sa priorisation et travailler tous ensemble à son élimination.

Un des meilleurs moyens de défendre la priorisation de la rage est de rappeler l’impact de la maladie et de montrer l’impact positif des interventions actuelles – montrant ainsi que l’élimination de la rage est réellement possible. En Asie du sud-est, GARC a apporté son soutien au projet mené par Boehringer-Ingelheim et Eco-Business de publier un livre blanc (document de sensibilisation en langage courant destiné à motiver les décideurs et les personnes intéressées) avec les dernières informations sur les défis à relever dans la région. Il a aussi fourni des recommandations importantes pour prévenir efficacement la rage, en contribution au plan stratégique global “Zéro cas en 2030“, aux objectifs régionaux et aux SDGs.

Ce livre blanc intitulé “Vers une Asie du sud-est libre de rage” est centré sur 5 pays de la région : Thaïlande, Vietnam, Philippines, Malaysie et Indonésie. Experts, principaux leaders d’opinion et acteurs de terrain ont été interrogés pour établir un bilan précis et de première main de la situation, des défis et des solutions nécessaires à l’élimination de la maladie dans la région.

White Paper cover - Moving towards a rabies-free SE Asia

Parmi les conclusions importantes:

  • L’augmentation sensible des cas de rage post-COVID-19.
  • La diffusion de la rage dans des zones qui n’étaient pas jusqu’ici considérées comme des zones actives.
  • La forte population de chiens libres et non vaccinés dans l’Asie du sud-est crée un risque très important de rage.
  • Une absence de sensibilisation aux risques de rage et à ce qu’il faut faire après une morsure de chien, un accès difficile au vaccin dans les régions reculées, la résurgence du commerce de la viande de chien, les perceptions et méconnaissances sociales et la difficulté à contrôler les mouvements des animaux aux frontières ont contribué à la diffusion de la maladie.

Alors que cela montre qu’il faut en faire plus, le livre blanc met en avant certaines des solutions que nous, en tant que communauté, pouvons apporter à ces défis. Par exemple, il est nécessaire d’améliorer la coopération et la coordination à tous les niveaux, du niveau local au niveau régional – en particulier en ce qui concerne la planification et la conduite des campagnes de vaccination antirabique. Une amélioration de la vigilance et de l’éducation est aussi un moyen essentiel de relever nombre de ces défis. Près de la moitié des victimes humaines de la rage sont des enfants, l’éducation des enfants est donc particulièrement importante. Enfin, l’amélioration de la surveillance est essentielle au succès. Nous savons que, sans surveillance, il est impossible de fournir des données pour défendre l’élimination de la maladie et mener des interventions stratégiques et efficaces.

En se concentrant sur la vaccination des chiens, l’éducation et la surveillance de la rage, l’équipe “Arrêtons la rage en Asie du sud-est“ de Boehringer Ingelheim, avec les outils de surveillance et le matériel éducatif de GARC, a vacciné plus de 23000 chiens et mené des campagnes éducatives de prévention de la rage dans les pays sélectionnés en 2023.

La rage est totalement évitable, l’Asie du sud-est reste pourtant un foyer actif de rage, avec des millions de personnes exposées au risque potentiel de contamination rabique. Changeons ça !

Le livre blanc met l’accent sur l’Asie du sud-est, mais beaucoup des conclusions et des solutions sont applicables à d’autres pays où la rage est endémique. Les réussites dans différentes régions de l’Asie du sud-est ont montré que des initiatives réellement durables, basées sur le partenariat et menées par les communautés peuvent prévenir la rage. Il faut maintenant arrêter d’ignorer une maladie qui touche si souvent les groupes défavorisés pour prioriser ces expériences avec plus de communautés pour mieux prévenir la maladie et obtenir l’élimination de la rage véhiculée par les chiens.

Article de: Dr Terence Scott (GARC) et Dr Tan Do Yew (Boehringer Ingelheim).