Quels sont les facteurs influençant les coûts des programmes de lutte antirabique ?

Dans un article récent paru dans la revue Transboundary and Emerging Disease, Elser et al. font une analyse utile de la variabilité des coûts liés à l’extension ou à la mise en place de programmes de lutte antirabique. Les auteurs de l’étude, basés pour la plupart au Centre national de recherche sur la faune sauvage au Colorado, ont comparé trois différents programmes de lutte antirabique et ont identifié des facteurs pouvant avoir un impact sur le coût d’un programme de vaccination : densité de population, sources de financement des programmes, et infrastructure existante. Une des conclusions majeures est de montrer à quel point les facteurs participant aux coûts des programmes peuvent dépendre de la localisation du programme.

Site de vaccination pour les chiens aux Philippines, 2016. © Geloy Conception and GARC.
Dog vaccination station in The Philippines, 2016. © Gelroy Conception and GARC.

 

Pour cette étude, les auteurs ont évalué trois sites de démonstration de vaccination antirabique canine coordonnée par l’Organisation Mondiale de la Santé et financée par la Fondation Bill et Melinda Gates, initialement au cours des années 2010-2012. Il s’agissait de sites d’endozootie rabique comprenant : 1) le KwaZulu-Natal, en Afrique du sud (essentiellement semi-rural) 2) Le sud-est de la Tanzanie (essentiellement rural), et 3) Cebu, une zone urbaine aux Philippines, un programme qui comprenait aussi une zone rurale. Les programmes présentaient de grandes variations en fonction de la solidité de leur implantation, du niveau d’investissement du gouvernement dans les campagnes de lutte antirabique, et de la densité de population de la région.

En comparant le coût par chien vacciné sur les trois différents sites, les auteurs ont montré que les programmes opérant dans les régions avec une plus faible densité de population entraînaient des coûts plus élevés. En détaillant les coûts relatifs à la vaccination, ce sont les dépenses liées au transport et au logement qui contribuaient le plus aux coûts des campagnes dans les zones rurales en raison de la nécessité de se rendre de maison en maison dans les zones à faible densité de population canine. Dans l’ensemble, les coûts de mise en œuvre constituaient la dépense principale pour toutes les campagnes, quelle que soit la localisation.

Les coûts de la prophylaxie post-exposition (PEP) présentaient moins de variations d’un site à l’autre, et la densité de population n’influençait pas le coût de provision de la PEP. Les comparaisons de coût ont montré qu’étant donné que le coût des produits biologiques étaient eux-mêmes tellement élevés, les autres facteurs contribuant au coût de la PEP étaient comparativement faibles.

La solidité de l’implantation d’un programme de lutte antirabique joue également un rôle essentiel dans le coût d’une campagne. Si le site faisait déjà partie d’un programme de lutte antirabique avant la nouvelle campagne, les dépenses liées à la constitution d’une infrastructure physique (congélateurs, materiel éducatifs supports de formation) étaient moindres puisque cela était déjà en place. Un personnel déjà formé est plus facile à trouver dans des zones où des programmes pré-existent, et les programmes qui opèrent sur des sites mieux établis tendent à tourner de manière plus efficace, réduisant ainsi les coûts.

Quand les gouvernements continuent à financer des programmes d’élimination de la rage sur le long terme, il existe une plus grande probabilité pour que le programme se poursuive indéfiniment. Les projets durables opérant sur le long terme ont globalement réduit les coûts en raison d’une meilleure efficacité opérationnelle telle qu’elle est décrite plus haut.

Une des limites de l’étude réside dans le fait que les données recueillies sur chaque site ne l’ont pas été de manière homogène d’un site à l’autre, compliquant ainsi certaines comparaisons de coûts. Par exemple, les coûts de vaccination n’ont été détaillés à l’échelle du district que sur certains sites (les Philippines et le sud-est de la Tanzanie), y compris le coût par chien vacciné. Mais ceux-ci n’étaient pas disponibles pour les données recueillies au Kwa-Zulu Natal. A l’avenir, les études devront se baser sur des méthodes de recueil de données homogènes de manière à réaliser une analyse plus poussée.

Planifier pour la première fois une lutte antirabique et des campagnes de vaccination peut constituer un défi et il est essentiel de connaître toutes les dépenses associées pour élaborer un budget suffisant. Une sous-estimation du financement peut entraîner des délais de mise en place ou de couverture vaccinale, entravant la lutte antirabique dans la région. Pour réussir efficacement une campagne, une connaissance approfondie des coûts associés et des facteurs influençant ces coûts est nécessaire.

Résumé par Laura Baker, GARC, à partir de l’article  “Toward canine rabies elimination: Economic comparisons of three project sites” par Elser et al. dans Transboundary and Emerging Disease.

Traduit par le Dr Brigitte Dunais, CHU de Nice, Nice, France